Les tours

Localisation :

Dates :

État du batiment :

Détruit

À l’instar des portes, les tours évoluèrent parallèlement aux enceintes de la cité. Disséminées sur l’ensemble du tracé des murailles, les tours venaient soit assurer la protection d’une porte, soit assurer la défense d’une portion de murs. La majorité d’entre elles se trouvaient sur la « clouaison », c’est-à-dire l’enceinte construite à partir de 1358 pour réunir les deux noyaux urbains. Cette clouaison faisait plus de 2560 toises (soit presque cinq kilomètres). Au début du XVIe siècle, 17 tours jalonnaient ainsi l’enceinte. À ces tours qui s’égrenaient sur les remparts, il fallait ajouter les tours qui furent progressivement intégrées au tissu urbain. Les tours intra-urbaines correspondaient aux vieilles tours défensives des anciennes enceintes de Châteauneuf et de la Cité. Certaines furent conservées, désaffectées et transformées en habitations. C’est notamment le cas des tours des Pucelles et Foubert.

 

La tour carrée

Située sur le tracé de l’enceinte du XIVe siècle, la tour Carrée, aussi désignée sous le nom de « grosse tour », « grosse tour carrée », ou encore « tour carrée du portal de Bretagne », prenait place à l’angle sud-ouest de la ville, sur le front de Loire et donnait sur le port dit de Bretagne. Sa construction s’étala entre 1358-1359 et 1362 et bénéficia de nombreux matériaux de récupération issus de bâtiments détruits à proximité. La couverture de la tour, dont la réalisation nécessita de recourir à un engin permettant de soulever les éléments de charpente jusqu’à son sommet, était ornée d’un étendard à quatre fleurs de lys [Toulier, 1974, p. 352]. La reconstruction de la tour fut entreprise en 1498. Les travaux furent confiés au maçon et architecte Jean Regnart [Giraudet, 1885, p. 343]. Selon Eugène Giraudet, une autre tour, ronde cette fois-ci, était présente en face du port de Bretagne. Sa réalisation, en 1421, était due aux soins de Jean de Saint-Denis, maître maçon architecte, et d’Yvonnet Malyon [Giraudet, 1885, p. 364].

 

La tour Chièvre

Implantée sur le rempart du XIVe siècle, la tour se situait le long de la rue Chèvre qui lui donna son nom. Elle fut construite entre 1470 et 1473, en même temps que la tour du Chardonnet qui lui était voisine. Elle présentait une forme de fer à cheval et possédait, en son intérieur, un diamètre environnant les 12 mètres. Pour assurer la protection du mur d’enceinte, les trois étages de la tour étaient percés de canonnières d’aspect assez archaïques [Galinié, 2007, p. 305]. La tour se décomposait en une salle basse et une salle haute, toutes deux voûtées, surmontées d’un parapet. Chaque étage était accessible par une échelle ou des marches en bois. Des mâchicoulis et des gargouilles étaient disposés sur le haut de cette tour crénelée [Galinié, 2007, p. 307]. Les comptes de la ville permettent de suivre l’avancée des travaux. 170 ouvriers furent employés pour la réalisation des travaux de la tour.

 

La tour de Picardie

Cette tour du Xe siècle érigée sur l’ancienne enceinte de Châteauneuf fut désaffectée après la construction de la clouaison de Jean Le Bon. Elle fut alors transformée en habitation et notamment en un hôtel particulier. Au début du XVe siècle, Jean Le Picard en fit sa résidence. À sa mort, sa veuve hérita de l’hôtel et mit le rez-de-chaussée en location. À la fin du XVIe siècle, la propriété fut divisée entre plusieurs propriétaires [Base POP, IA00071385].

 

La tour des Jacobins

Cette tour était située à proximité de la porte Foire-le-Roi dont elle assurait la défense. Elle comprenait un martinet, c’est-à-dire une machine de guerre à contrepoids qui permettait de lancer de gros projectiles [Toulier, 1974, p. 352].

 

La tour du Chardonnet

Cette tour, construite sur le mur d’enceinte du XIVe siècle, était voisine de la tour Chièvre qui lui était contemporaine. La construction des deux tours fut décidée simultanément. Les travaux de la tour du Chardonnet furent menés entre 1470 et 1472 [Galinié, 2007, p. 305]. En 1510, la ville y conserva ses poudres [AM Tours, CC reg. 57, f°21 v°].

 

La tour Feu-Hugon

Située sur le tracé de l’ancienne enceinte des Arcis, la tour Feu-Hugon remonterait au IXe siècle et serait l’œuvre de Hugues l’Abbé, comte de Tours, bien que les premières mentions la concernant ne remontent qu’au début du XIIe siècle. Entre 1379 et 1432, plusieurs réparations ont été entreprises sur la tour [Mabire La Caille, 1989, p. 163-164  & Renumar, 6 février 1380]. En 1432, les élus font même venir Jean de Dammartin, maître d’œuvre de la cathédrale, pour expertiser la tour [Renumar, 21 décembre 1432]. En 1423, pour assurer la défense de la tour, la municipalité y installa un canon. L’année suivante, une cloche fut installée pour servir d’alarme. Outre le canon installé en 1423, la défense de la tour était assurée par un pont-levis qui ouvrait sur un pont dormant surplombant la douve. En 1461, un boulevard vint compléter le système défensif [Mabire La Caille, 1989, p. 166]. À partir de 1498-1499, la tour eut une fonction plutôt singulière puisqu’elle servait de lieu de vie à un lion. L’animal avait été confié aux bons soins de la ville par le roi Louis XII [Renumar, 18 novembre 1500].

Un siècle plus tard, la tour avait perdu son rôle défensif et toutes autres fonctions. En sa qualité de vicomte de Tours (la tour appartenant au fief de la vicomté), Jacques de Beaune, petit-fils du célèbre surintendant des finances, céda les dépendances de la tour dans la seconde moitié du XVIe siècle. La ville récupéra cependant la propriété de la tour jusqu’en 1695. Inoccupée et inutilisée, elle fut laissée à l’abandon, si bien qu’en 1635, le couronnement, en ruine, doit être démoli. Une autre partie de la tour subit le même sort en 1643. Au début du XVIIIe siècle, ce qu’il reste fut détruit afin de récupérer le salpêtre [Mabire La Caille, 1989, p. 164].

Les plans du XVIIIe siècle donnent une idée de ce à quoi la tour a pu ressembler. Elle avait vraisemblablement été construite à cheval sur la muraille selon un plan rectangulaire. Elle aurait mesuré près de 20 mètres de long sur 12 de large. Si sa hauteur reste inconnue, les représentations de la ville du XVIe et XVIIe siècle laissent à penser qu’elle était dotée d’une hauteur importante [Mabire La Caille, 1989, p. 165].

 

La tour de flanquement intermédiaire entre la tour Saint-Antoine et la tour Feu-Hugon

Une tour intermédiaire était installée entre la tour Feu-Hugon et la tour Saint-Antoine. Moins importante que ces voisines, elle fut moins entretenue que ces dernières. Seules des réparations en 1656 lui sont connues. Elle fut détruite au début du XVIIIe siècle.

Selon une gravure de 1625, la tour présentait un plan carré, ce qui contredit son origine romaine. Claire Mabire La Caille avance deux hypothèses à cette contradiction. Soit l’auteur de la gravure s’est trompé en réalisant son œuvre ce qui paraît étonnant au vu de la précision dont il a pu faire preuve pour les deux tours voisines, soit la tour, à l’origine de plan circulaire, aurait été reconstruite, peut-être entre le IXe et le XIe-XIIe siècle [Mabire La Caille, 1989, p. 168].

 

La tour Saint-Antoine

Selon Édouard Gatien de Clérambault, la tour Saint-Antoine, aussi appelée tour carrée, aurait été construite entre la fin du XIVe siècle et le début du XVe siècle [Mabire La Caille, 1989, p. 167]. Claire Mabire-La Caille y voit plutôt une construction antérieure qui aurait pu être l’œuvre de Geoffroy Martel au XIe siècle [Mabire La Caille, 1989, p. 167-168]. Du côté des archives, la tour est mentionnée pour la première fois en 1485. Tout comme la tour Feu-Hugon, avec laquelle elle a parfois pu être confondue, la tour Saint-Antoine était à l’origine défensive, en témoigne la présence de canons. Devenue inutile avec la fin de la guerre de Cent ans et la construction de la nouvelle enceinte du XVIe-XVIIe siècle, la municipalité la mit en location en 1619. À moitié en ruine malgré les tentatives de la ville pour l’entretenir, la tour devint un refuge pour les gens de mauvaise vie. Après réparation, elle fut à nouveau louée mais elle fut finalement détruite en 1779 lors des travaux d’aménagement des quais de Loire [Mabire La Caille, 1989, p. 167].

La tour présentait un plan carré d’environ 13 mètres de côté. Elle était dotée aux angles nord-est et nord-ouest de contreforts. Son couronnement était crénelé et doté de mâchicoulis. Lorsque la Loire fut amenée aux pieds des remparts de la cité, la tour dut servir de lieu d’amarrage pour les embarcations naviguant sur le fleuve [Mabire La Caille, 1989, p. 167].

 

La tour neuve sur le pont Eudes

Dès 1446, le peintre Denis Mauclert se vit confier la réalisation d’un écusson peint représentant les armes de Charles VII destiné à la tour neuve de l’arche Saint-Ciquault [Renumar, 8 août 1446].

 

La tour Foubert

Datée de la fin du XIIe ou début du XIIIe siècle, il est probable que cette tour ait été édifiée pour protéger la porte de l’Écrignole. Construite sur l’enceinte du Châteauneuf, elle se situait à l’emplacement des n°6 et 8 de l’actuelle rue de Jérusalem. Elle fut donnée par le roi au chapitre de Saint-Martin en 1323 [Clérambault, 1912, p. 18]. À l’instar de la tour des Pucelles, la tour Foubert devint obsolète avec la création de la clouaison du XIVe siècle, elle fut donc, elle aussi, transformée en habitation. Elle prit alors le nom de tour de la tabagie. La tour fut détruite en 1958 [Galinié, 2007, p. 263].

 

La tour des Pucelles

La tour des Pucelles était située dans la rue des Fouquets (perpendiculaire à la rue de Jérusalem). Elle était sur le versant nord de la rue des Fouquets, en son milieu [Grandmaison, 1870, p. 15]. Elle assurait la protection de la porte de l’Écrignole sur le tracé de l’enceinte de Châteauneuf. Avant la construction de la clouaison du XIVe siècle, elle abritait l’arsenal de Châteauneuf, et servait donc de dépôt d’armes et de munitions. Avec la réalisation de l’enceinte du XIVe siècle, la tour perdit sa fonction défensive. Elle fut désaffectée et transformée en habitation. Le chapitre de Saint-Martin, propriétaire de la tour, la loua en 1448 à la famille de l’enlumineur Jean Fouquet. Il est possible que la famille ait occupé la tour dès 1439 puisque l’on retrouve dans un inventaire des fonds de Saint-Martin la présence d’un Fouquet qui louait une maison dans le fief du chapitre [Grandmaison, 1870, p. 16]. L’autre partie de la tour était habitée par Yvonnet de Mauléon, sculpteur [Giraudet, 1885, p. 278]. En 1580, c’est un autre artiste qui investit les lieux. Le brodeur du roi, Pierre Rabusseau loua à son tour une partie de la tour [Giraudet, 1885, p. 341].

 

La tour Jean Laillier

Cette tour, datée du XIVe siècle, était située à une soixantaine de mètres de la porte de La Riche, comprenait un sommet crénelé et une guérite qui abritait les gardes responsables du guet [Toulier, 1974, p. 354].

 

Les autres tours pour lesquelles nous manquons d’informations

La tour Chaloineau : 1470-1472
La tour Saint-Jean : XIVe siècle
La tour Saint-Vincent : 1448-1451
La tour Malquin ou Grosse Tour : XIVe siècle
La tour Posson : XIVe siècle
La tour Rouge : XIVe siècle
La tour de Cupidon : XIVe siècle
La tour de la Guespière : XIVe siècle

 

Bibliographie

Galinié Henri (dir.), Tours antique et médiéval. Lieux de vie, temps de la ville. 40 ans d’archéologie urbaine, Supplément à la RACF n° 30, numéro spécial de la collection Recherches sur Tours, Tours, FERACF, 2007.
Gatian de Clérambault Édouard, « Tours qui disparaît », dans Mémoires de la Société archéologique de Touraine, in 4°, V, 1912.
Giraudet Eugène, Les artistes tourangeaux, architectes, armuriers, brodeurs, émailleurs, graveurs, orfèvres, peintres, sculpteurs, tapissiers de haute lisse, notes et documents inédits, Tours, Impr. de Rouillé-Ladevèze, 1885.
Grandmaison Charles-Louis, Documents inédits pour servir à l’histoire des arts en Touraine, Paris, Dumoulin, 1870.
Mabire La Caille Claire, Évolution topographique de la cité de Tours des origines jusqu’au XVIIIe siècle, Thèse de doctorat en archéologie sous la direction de Léon Pressouyre, Université Paris 1 Panthéon-Sorbonne, 1989.
Toulier Bernard, « Contribution à l’étude du tracé de l’enceinte du XIVe siècle à Tours (angle Nord-ouest) », dans Bulletin de la Société archéologique de Touraine, T. 37, 1974, p. 351-371.